Société, politique, économie : les impacts de l'intelligence artificielle sur notre monde
- Noé Renard
- 28 déc. 2023
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 29 déc. 2023
Avant les années 2000, personne ne se souciait de la puissance des IA. Mais aujourd’hui leur place est centrale dans la société, en politique ou dans l’économie.

Comme dans tous les domaines, le développement de l’IA s’apparente à une compétition. Il faut faire face à la concurrence mondiale en matière d’IA, l’enjeu est intérieur et extérieur : il s’agit d’améliorer notre société tout en faisant face à la compétition mondiale. Car sur le papier au départ, l’IA était vouée à aider les individus, mais des dérives économiques et des risques pour la société apparaissent. Il faut désormais trouver le bon équilibre entre profiter des nouvelles possibilités et éviter les dangers qui naissent avec le développement de cette technologie.
Alors que l’IA est rendue accessible au grand public avec la parution ces dernières années de logiciels tels que Chat GPT et MidJourney, de nombreuses réactions se font entendre dans la classe politique. Du côté des Républicains, Éric Ciotti déclarait, lors d’une Nuit des IA, que ces dernières « présentent plus d’opportunités encore que de dangers », ne s’opposant donc en aucun cas au développement de ces nouvelles technologies. De son côté, l’eurodéputé du Mouvement Place Publique, Raphaël Glucksmann, craint que les intelligences artificielles emportent « nos démocraties dans l’abîme », pensant qu’elles ne puissent qu’exacerber les problèmes sociétaux actuels. Le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, en a fait l’objet d’une note au chef de l’Etat et s’agace en privé que les députés macronistes tardent à s’emparer du sujet, aucune ligne claire n’a été adoptée par la majorité à ce sujet, bien qu’une politique nationale ait été mise en place. Enfin, le président du Rassemblement national, Jordan Bardella semble vouloir mettre l’encadrement des IA au sein du débat politique et parle d’un « autre grand remplacement » face à leur développement.
Ces réactions reflètent des positions politiques diverses, même si aucun parti ne propose pour l’heure de réponses concrètes alors que la thématique devient omniprésente dans le débat public.
La célèbre phrase d’Abraham Lincoln, Président des États-Unis de 1860 à 1865, disait « Un gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ». Il définissait alors le principe de démocratie, cette forme de gouvernement dans laquelle la souveraineté appartient au peuple. Celle-ci, pourrait ne pas supporter l’introduction d’un acteur extérieure à la société, l’Intelligence artificielle. Cela reviendrait à introduire dans la vie politique un acteur externe, qui même s’il possède des avantages, pourrait rapidement mettre nos systèmes en péril, en éloignant le pouvoir des citoyens.
Dans le domaine politique et sociétal de manière globale, l’IA à des effets positifs tout comme négatifs. L’IA générative (qui fournit des informations, comme le logiciel ChatGPT) transforme la manière de faire de la politique en permettant une compréhension plus pertinente et fine des conséquences d’une décision, aidant à évaluer les effets à long terme d’une réforme par exemple. L'IA permet de conseiller et d’appuyer les personnalités politiques dans l’exercice de leurs fonctions. L’intelligence artificielle peut également permettre une meilleure diffusion de l’information et une meilleure connaissance des questions politiques, garantissant alors une égalité dans l’accès aux connaissances et permettant à chacun de se former une opinion.
Bien que cela semble bénéfique pour nos démocraties, l’IA soulève des inquiétudes quant à la création de désinformation convaincante. Ces fakes news, toujours plus réalistes, pourraient être utilisées pour manipuler des segments de l’électorat en créant des contenus personnalisés et persuasifs, exacerbant ainsi potentiellement la crise actuelle de l’information. C'est l’une des principales préoccupations liées à cette technologie, qui pourrait rapidement priver les individus d’esprit critique et de réflexion libre sur des thématiques politiques. L’inquiétude monte quant à l’impact de l’IA sur les élections. Alors que des scrutins sont prévus dans 45 pays en 2024, les résultats pourraient être biaisés par ces logiciels numériques.
Des appréhensions se développent également sur la capacité de l’IA à surveiller les individus. Des états comme la Chine utilisent déjà l’IA générative pour encadrer leur population, créant de réels doutes sur le respect des vies privées. Une question éthique se pose alors face au développement fulgurant de cette nouvelle technologie.
C'est l’une des raisons pour laquelle il est essentiel d’encadrer les pratiques technologiques liées à l’IA. Cette législation s’organise principalement au niveau européen.
La Commission européenne a présenté, en 2021, une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles harmonisées concernant l'intelligence artificielle. Un accord a été trouvé à ce sujet le lundi 11 décembre visant à l'interdiction et l’encadrement de certaines pratiques dans différents objectifs. L’UE entend veiller à ce que les systèmes d’IA mis sur le marché soient sûrs et respectent la législation en vigueur en matière de droits fondamentaux, les valeurs de l’UE, l'État de droit, mais aussi la durabilité environnementale. Et veut également garantir la sécurité juridique afin de faciliter les investissements et l’innovation dans le domaine de l’IA.
Le mardi 5 décembre 2023, Jean-Noël Barrot, Ministre délégué en charge des Nouvelles technologies et du Numérique, précisait la position de la France lors du Conseil "Transports, télécommunications et énergie" de l'Union européenne. Le ministre a mis en avant l’impact de ces technologies : « Celui qui conçoit l'outil technologique a beaucoup plus d'influence sur le cours des choses que celui qui le régule ». En effet, avec l’ensemble des risques associés aux IA, leurs créateurs et détenteurs ont acquis une importante influence et leurs actions pourraient avoir de larges répercussions. C’est pourquoi il est nécessaire de se doter d’une telle législation. « C'est là que doit se porter toute notre attention », déclarait le ministre, plaçant cette thématique sur le devant des préoccupations françaises et européennes.
Au niveau national, aucune législation n’est en vigueur, mais la France veut devenir pionnière dans le domaine. L’exécutif souhaite développer l’IA dans le cadre du projet « France 2030 » et par la même occasion faire naître des mesures d’encadrement des pratiques. 2,2 milliards d’€ sont consacrés à la stratégie nationale pour l’intelligence artificielle pour la période 2021-2025, dont l’objectif est de diffuser ces technologies au sein de l’économie tout en soutenant le développement et l’innovation dans différents autres domaines. Ce plan national touche à divers domaines, notamment la formation d’étudiants, l’accompagnement des entreprises, … dans l’espoir de capter 15% du marché mondial de l’IA à terme. L’IA permettrait ainsi d’obtenir des gains de compétitivité et de productivité dans tous les secteurs de l’économie et dans les services publics. Le ministère de l'Économie parle de « 4e révolution industrielle ». Selon le cabinet Statistica, le développement de cette innovation rapportera près de 90 milliards de dollars par an à la France à l’horizon 2025, un marché d’avenir pour les entreprises, et 502 start-ups spécialisées sont déjà implantées sur le territoire.
Les politiques publiques sont donc incitées économiquement à s’orienter vers un développement plus libre de l’IA.
Au niveau international, aussi, l'IA est considérée comme un levier stratégique en raison de sa capacité à transformer divers secteurs tels que la finance, la santé, l'agriculture et l'armement, et les grandes puissances y trouvent un immense intérêt. Être le précurseur dans ce domaine confère des avantages majeurs, d'où une rivalité intense entre les nations.
Celle-ci est exacerbée par des différences idéologiques et d’intérêt entre les régimes dans des domaines tels que la liberté d'expression, les droits de la personne et la surveillance. En effet, les IA ne sont pas programmées dans les mêmes objectifs aux US ou en Chine. Cela met en lumière la nécessité de régir ces pratiques au niveau mondial. Actuellement, il n'existe pas de régime international contrôlant le développement de l'IA. La Chine et les États-Unis, acteurs majeurs qui dominent ce secteur stratégique, ont donc le pouvoir d’influencer les futures pratiques et politiques. Les autres acteurs tels que la France étant encore loin derrière ces deux géants, et ne pèsent pas sur la scène internationale.
L'évolution rapide de l'intelligence artificielle (IA) attire l'attention des divers acteurs politiques, générant des perspectives variées sur ses implications. Certains expriment à la fois leur enthousiasme pour les opportunités qu'offre l'IA et leurs préoccupations quant à ses possibles dérives. La nécessité de réguler l'IA semble donc être devenue une priorité, et d’un autre côté, la France, ambitieuse, investit massivement dans le secteur pour devenir un leader mondial, mais la rivalité entre grandes puissances souligne l'absence actuelle d'une régulation internationale. L'équilibre entre l'exploitation des avantages de l'IA et la protection contre ses risques dépendra de décisions politiques éclairées, de régulations judicieuses et d'une coopération internationale efficace. L'avenir de l'IA dans la politique nécessite une approche équilibrée pour maximiser les avantages tout en minimisant les risques.
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